L'auberge "la tête de sanglier"

Marie fronça les sourcils.

- Sylph... Vous a... dit? Il a parlé? C'est vrai? Il n'a pas prononcé un mot depuis qu'il est ici ! C'est incroyable! Vous possédez peut être un remède contre la perte de parole? J'en voudrais bien pour notre petite Pia alors!

Voyant que sa femme commençait à s'emporter devant Harle, il voulut réfréner cette attitude presque agressive.

- Tu ennuie nos clients, femme ! Retourne plutôt dans la cuisine, la nourriture ne vas pas se préparer seule! Allez !

Pour toute réponse, elle lança une grimace à son époux, elle se rendit vers la cuisine mais en marchant lentement pour que Harl puisse lui répondre. L'aubergiste reprit la parole :

- Bien entendu, vous pourrez rester ici.

Harl resta surprit:

-Vous ne comprenez pas ce qu'il dit?

Il regarda Sylph qui toucha enfin sa bouche en haussant les épaules:

«Je n'ai jamais rien dit via la parole.»
-Pourtant je t'entend clairement. Je dois dire que j'excèle dans le langage du corps mais à dire que j'entend ta voix à merveille, c'est curieux.

Son regard et celui de Sylph restèrent longtemps fixés l'un sur l'autre puis Harl se détourna enfin:

-Ça va, tu gagnes... J'ai pas essayé de parler avec mademoiselle Pia, mais voudrais-tu que j'essaie?
«Oui»
-D'accord. Je crois que tu as promis à cette dame de l'aider à cuisinier.

Sylph partit au pas de course et Harl lui lança:

-Ne t'en met pas partout, c'est pas toi, le repas!

Le petit se retourna avec une mine boudeuse et lui tira la langue avant de disparaître dans les cuisines. De son côté, Harl se mit à chercher Pia du regard.

Lorsque le petit garçon entra dans la cuisine, Marie lui tendit un tablier.

- Tiens mon bonhomme, il ne faudrait pas que tu tâches tes vêtements.

Elle aida le petit garçon à enfiler le vêtement. Tout en lui expliquant :

- C'est simple, pour le moment, il n'y a pas beaucoup de client, alors tu vas m'aider à cuisiner, ensuite, lorsque les gens vont commencer à arriver, tu iras en salle et tu devras apporter leur commande aux gens. Tu penses pouvoir faire ça?

Elle lui fit un joli sourire. Même si elle ne comprenait pas ce qu'il disait, un hochement de tête affirmatif lui suffirait.

***

Dans la salle, Pia remplaçait sa soeur qui en profita pour prendre sa pause. Elle prenait les commandes de tables en tables, souriant aux gens pour toute parole.

Harl trouva Pia et la salua, elle semblait souffrire d'un traumatisme depuis le début, mais il y en avait pas beaucoup qui voyaient ce genre de choses chez les autres. Le jeune médecin se rappella l'enseignement de base du langage muet à Sylph qui semblait souffrir d'un maladie semblable. Le langage des signes était le premier des autistes. Ne sachant pas si elle saurait le saluer convenablement, il prit lentement de plateau des mains de Pia pour ne pas l'efrayer, il le déposa un instant sur une table, l'attention était sur eux et un silence lourd prit place. Avec lenteur, il prit les mains de pia et les fit esquisser un mouvement complexe semblable à ceux de Sylph. Il entendait le jeune garçon mais celui-ci semblait avoir besoin de ces mouvements pour s'exprimer. Il fit lui-même le signe, les yeux toujours rivés dans ceux de Pia.

-Bonjour... Salut... Bon matin... Bonsoir...

Ces mots ne vallaient rien. La fille un peu moins agée que lui savait probablement qu'on utilisait ces termes quand on arrivait et qu'on saluait. Chaque mots avaient une variante mais il allait les résumer en un seul mouvement pour le moment. Il sourit, reprit le plateau et le déposa dans les mains de Pia sans en demander plus. Il ne savait vraiment pas pourquoi il lui apprenait cette langue puiosqu'il était convaincu de l'avoir entendu à un certain moment.
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Sylph mit le tablier trop grand qui lui arriva jusqu'au bout des pieds et trébucha lorsqu'il tenta d'avancer. Il bouda un instant puis se releva tant bien que mal. Il se mit à friponner le tablier qui arriva enfin jusqu'à ses genoux. Il leva les yeux vers elle et lui montra sa main le pouce relevé, un regard confiant qui voulait dire:

«Compris m'dame, je m'en sortirai!»

Marie n'eut aucun mal à comprendre ce petit geste universel. Elle s'approcha de celui qu'elle prenait toujours pour un enfant (mais les autres ne restaient-ils pas éternellement des enfants pour une femme comme elle?) et lui posa un gros bisou sur la joue avant de lui ébouriffer les cheveux d'un geste maternel.

- Bon... que va-t-on te faire faire à présent?

Elle jeta un oeil au alentours et lui fit signe de s'assoir.

- Bon, il va falloir préparer du pain. Beaucoup de pain. Voici comment il faut faire :

Elle lui montra comment mélanger les ingrédients, pétrir la pate et obtenir une boule prêt à cuire. ça prit un bon moment, mais ce n'était vraiment pas compliqué.

- Allez, à toi mon poussin!

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Pia fut assez surprise lorsque l'homme étrange prit son plateau et saisit ses mains. Instinctivement, elle se recroquevilla en elle-même. Et s'il la bousculait sur une table? Et s'il lui soulevait la jupe et la violait tout en la battant? Non ! Pas ça ! Dans la salle, tous les autres avaient le regard rivé vers eux. Si Harl avait le malheur de faire du mal à la petite mascotte de l'auberge, ça irait mal pour lui... Mais non, il ne lui fit qu'exécuter quelques mouvements avec les mains. Pia se sentit soulagée quoi que tout de même surprise. ça ressemblait beaucoup aux mouvement désordonnés de Sylph. Il abandonna assez rapidement et s'en retourna.

Pia prit alors sa petite flûte qui pendait à sa taille et lança une petite trille en direction de Harl. C'était une note parfaitement interrogative. Durant le court instant que dura la note, Harl put sentir une grande curiosité qui n'était pas la sienne en lui.

Harl se retourna vivement, le visage marqué d'un sourire:

-Je me disais bien avoir entendu votre voix.

Il utilisait le langage universel du petit peuple, même un sourd pouvait le comprendre. Ce n'était qu'une des nombreuses langues qu'il savait parler.

-Je m'appelle Harl, j'ai essayé de vous apprendre le langage des signes.

Il refit le signe de salut, invitant Pia à l'immiter.
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Étant parvenu à se couvrir de farine de la tête au pieds, Sylph semblait s'amuser énormément à faire du pain. Il n'avait pas vraiment de talent mais lorsqu'il sortaient du four, une audeur plus aléchante que normale emplissait le cuisine, le pain pouvait sembler difforme à l'entrée, mais il sortait en oeuvre d'art. Son visage que la farine rendait fantômatique était marqué d'un véritable sourire de joie. Sa dernière création était un chat un peu trop réaliste. Ayant terminé de stock de pain demandé en un rien de temps. Il sautilla vers Marie en laissant des nuages derrière lui, il lui montra son chat tout juste cuit avec fierté.

Ce langage rappelait à Pia quelque chose... quelque chose qu'elle aurait pu apprendre il y a longtemps avant de tout oublier. Quelque chose qui s'était produit avant qu'elle n'émerge de la forêt... C'était... Un choc. Elle se prit soudain la tête dans les mains comme si une douleur s'emparait soudain d'elle. Son plateau se renversa sur le sol, faisant se retourner tout le monde de surprise. La jeune femme tomba à genoux, recroquvillée sur elle même. Lorsqu'elle redressa la tête, elle était partie... Dans son regard, on ne pouvait lire aucune trace d'intelligence, comme si elle n'était qu'une coquille vide. Ses bras cependant bougèrent et elle s'enlaça elle-même avant de se bercer, son corps penchant d'avant en arrière de manière lancinante.

Qu'avait-il bien pu se passer? La question était sur toutes les lèvres des personnes autour d'elle. Une crise était toujours déclanchée par quelque chose mais là, il n'y avait rien eut !

...

Marie observa le petit animal comestible avec un moue mi figue mi raisin.

- C'est très bien mon chéri... Mais ce n'est pas ce que je t'ai demandé de faire... Toute cette bonne nouriture perdue. Personne ne voudra manger un chat aussi joli.

Elle s'approcha de lui et lui frotta la tête de manière affectueuse :

- Mais tu as voulu bien faire et c'est l'essentiel.

Soudain un bruit d'objet renversé se fit entendre. Inquiète, la petite bonne femme s'en alla près de la porte et aperçue sa fille adoptive qui était en pleine crise :

- Pia ! s'écria-t-elle avant de courir à son chevet et de l'entourer de ses bras protecteurs.

La déception de Sylph fut intérompue par un hurlement silencieux. Il courrut vers Harl qui s'était penché vers Pia alors que Marie tentait de la réconforter. Sentant que les hostilités allaient bientôt se lever contre Harl, il se plaça devant lui, histoire de faire écrant protecteur. S'ils se mettaient dans la tête de faire du mal la seule personne magique en qui il avait confiance, il ne savait pas ce qu'il pourrait faire. Il regarda Pia avec apréhention et posa un regard questionneur sur Harl:

-J'ai utilisé la langue universelle. Je ne...

Mais personne ne se leva pour faire du mal à Harl. Qui aurait pu deviner qu'il avait utilisé la langue du petit peuple? Personne ne la connaissait ! Pas plus que quiconque aurait pu deviner l'effet que ça aurait sur la jeune femme. Marie se retourna vers les deux garçons, un peu étonné de voir Sylph jouer les épouvantails.

- Je vais aller la coucher... le mieux que l'on puisse faire, c'est d'attendre. Elle est un peu étrange. Elle a toujours été comme ça. On l'a retrouvé un jour au bord de la forêt. Personne ne sait vraiment d'où elle vient, ni ce qu'elle a vécu... Mais elle n'est pas méchante. Il ne faut pas s'inquiéter. Mon poussin? tu veux bien la veiller? Je n'en ai pas le temps avec le restaurant.

A peine ses mots prononcés, elle tendit le bras vers Pia qui se mit soudain à léviter. Meilleur moyen pour la mettre au lit !